Bullshit Jobs dans la fonction publique

« Les bullshit jobs sont ces emplois qui donnent l’impression d’être importants, mais qui, en réalité, ne contribuent que très peu à la société. »
— David Graeber

Il fut un temps où l’on taillait la pierre pour ériger des cathédrales. Aujourd’hui, dans trop de bureaux de la fonction publique, on coche des cases. Et certains ne savent même plus pourquoi.

La cathédrale oubliée

À l’heure où chacun cherche à aligner sa vie professionnelle à ses valeurs les plus intimes, la fonction publique aurait pu incarner l’idéal : servir l’intérêt général, contribuer à quelque chose de plus grand que soi. Mais ce noble horizon s’est brisé contre les murs d’un système lourd, hiérarchique et déshumanisant. Là où devait régner la fierté du service public, s’installe une morosité contagieuse.

Le COVID-19 n’a pas seulement révélé la fragilité de notre système de santé ; il a aussi levé le voile sur une crise silencieuse : celle du sens au travail. Depuis, une quête s’est imposée aux esprits : celle d’une cohérence profonde entre ce que l’on fait et ce que l’on est.

Fonction publique : le paradoxe de l’intérêt général

Maslow Bullshit Jobs dans la fonction publique

Servir le bien commun. Quelle plus belle mission ? Et pourtant, cette mission est aujourd’hui si peu nommée, si peu incarnée, qu’elle semble reléguée au second plan, éclipsée par l’ombre tentaculaire des procédures, des normes et des chaînes hiérarchiques.

Les fonctionnaires oublient parfois qu’ils œuvrent pour la société. Ce n’est pas un manque de cœur, mais le symptôme d’une organisation qui n’envoie plus les bons signaux. Un mal discret, insidieux, qui s’installe comme un brouillard sur les vocations.

Quand le service public fabrique des emplois inutiles

Graeber avait vu juste. La fonction publique est devenue, à bien des égards, une fabrique de bullshit jobs. Ces postes, souvent vides de sens, dévorent l’énergie sans jamais nourrir l’esprit.

Les flunkies, ces agents relégués à des tâches sans reconnaissance.
Les goons, contraints de surveiller, contrôler, au détriment de la confiance.
Les duct tapers, condamnés à réparer les absurdités d’un système inefficace.
Les box tickers, perdus dans un océan de paperasse inutile.
Et les taskmasters, ces chefs sans vision, plus occupés à maintenir la paix sociale qu’à inspirer.

À travers eux, c’est toute une machine qui tourne à vide, gaspillant le plus précieux des carburants : le sens.

Le coût invisible : burn-out, brown-out, bore-out

Ces dérives ne sont pas qu’intellectuelles. Elles laissent des traces bien réelles : fatigue chronique, désengagement, détresse psychologique. On les appelle burn-outbrown-outbore-out – trois visages d’un même mal : la perte de sens.

Ces pathologies modernes, loin d’être de simples caprices, rongent les individus, désorganisent les services, plombent les finances publiques. Et pourtant, dans un étrange paradoxe, la stabilité de l’emploi empêche trop souvent la fuite. Comment partir quand on vous a appris à endurer, même le vide ?

Des plans, des diagnostics… et alors ?

Oui, des dispositifs existent. Référents bien-être, bilans de risques, protocoles RH. Mais ces solutions ne s’attaquent qu’aux symptômes. Elles réparent après coup, quand il faudrait, enfin, oser réformer l’architecture même des organisations publiques.

Car ce n’est pas de yoga sur la pause déjeuner dont ont besoin les agents, mais de reconnaissance, de liberté d’agir, et surtout, d’un rappel constant du sens de leur mission.

Le management comme levier… ou poison

Trop souvent, le management dans les collectivités reste infantilisant, directif, déconnecté. Il bride les talents au lieu de les révéler. Il reproduit des schémas hérités d’un autre siècle, alors que la nouvelle génération exige plus que jamais du sens, du respect et de la confiance.

Les leviers existent, mais ils exigent du courage. Celui de réformer en profondeur les structures, de former les managers autrement, de redonner la parole aux agents, de désacraliser les process absurdes.

Retrouver la cathédrale

Il est temps de rappeler à chaque tailleur de pierre pourquoi il travaille. Car au fond, tous veulent construire une cathédrale.

Le service public a encore cette puissance : il peut donner du sens. Mais pour cela, il doit se réinventer, sortir de la logique du poste pour entrer dans celle de la mission, restaurer le lien entre l’individu et le collectif, entre l’action et sa finalité.

Car un emploi, ce n’est pas seulement une fiche de poste. C’est un acte de foi dans le monde que l’on veut bâtir.

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